Championnat de vacances
Les inter-quartiers entament leur dernière ligne droite. Passion, engagement mais aussi grandes sont les inquiétudes des organisateurs.
1- La problématique de l’organisation
Organiser un championnat inter-quartier en période de vacances n’est pas chose facile. Contrairement aux apparences. Les promoteurs doivent faire face à la lourde procédure administrative qui conduit à l’obtention de l’autorisation. Elle comprend une batterie des documents : - Demande d’autorisation à la délégation provinciale des sports et de l’éducation physique compétente. - Demande d’autorisation de manifestation à la sous-préfecture territorialement compétente. Autorisation d’utilisation du terrain de football indiqué – Présentation des statuts et règlements régissant le championnat – police d’assurance souscrite – Liste des dirigeants.
Une procédure pas du tout évidente à en croire les organisateurs et sur le plan financier nécessite près 200.000 Fcfa de dépense global. Mais, certains organisateurs réussissent toujours à contourner la procédure. Ainsi il pilule de nombreux championnats illégaux dans la cité. Lorsque les promoteurs ne réussissent tout simplement pas à éviter de s’acquitter des charges lourdes. Notamment en obtenant des polices d’assurance de pacotille ou s’abstenant à souscrire une police. « Dans ces conditions, il faut espérer que la compétition se déroule sans accident grave », indique un cadre du Minsep. Autre dépenses et pas des moindres la location du stade sollicité, l’aménagement des infrastructures et l’acquisition de la logistique (impression des licences, feuilles de matches, matérialisation du stade à chaque journée). De quoi rappeler aux aventuriers de s’abstenir. « Nous avions voté un budget prévisionnel de 6 millions Fcfa avant le démarrage», affirme Charly Manga, président de Deido Match 2007.
Avec cet argent, l’association des jeunes de Déido (Ajed) sous label duquel Charly Manga organise ce championnat a réussi à construire une tribune couverte de 100 places. « On avait l’ambition de construire deux tribunes des deux côtés latéraux du stade, mais les moyens ont fait défaut », déclare Charly Manga. Pour rentrer dans leurs frais, l’entrée de l’enceinte de l’école publique est payante (100 Fcfa) indépendamment des frais d’accès à la tribune (100 Fcfa). Cela permet ainsi lors des journées de grande affluence de faire des recettes avoisinant les 20.000 Fcfa. Et espérer amortir les charges. « A la fin il faudra aussi bien désintéresser, même symboliquement les membres du comité d’organisation », reconnaissent tous les promoteurs.
2- Enjeux financiers
Mais les principales sources de revenus dans les championnats de vacances proviennent de l’affiliation des clubs, l’achat des licences. Respectivement de 25.000 Fcfa par club et 1000 Fcfa par joueur à Déido Match 2007. A cela s’ajoute les pénalités des équipes. Voilà ce que doit s’acquitter les trente six (36) équipes affiliées (reparties en quatre poules) pour disputer la compétition jusqu’à la fin. Soit la phase championnat et la phase coupe. L’un des plus moins coûteux et les mieux primés avec 200.000 Fcfa, un trophée et un ballon mis en jeu pour le champion et de même pour le vainqueur de la finale. 100.000 Fcfa pour le vice-champion ainsi que pour le finaliste. 40.000 Fcfa pour les champions de poules. « C’est une expérience malheureuse au niveau financier, mais une grande satisfaction au regard de l’émulation des jeunes et du spectacle fourni. Surtout que nos équipes sont issues des différents quartiers du Canton Déido et ses environs, ce qui explique cette forte mobilisation et ambiance chaude », affirme Charly Manga.
Ailleurs, les organisateurs n’offrent pas les mêmes conditions de participation. C’est le cas de Relance Foot de la Cité-Cicam où l’affiliation est de 20.000 Fcfa par équipe, la licence 1000 Fcfa, la participation à la phase de coupe revient à 25.000 Fcfa par équipes en plus des pénalités : 500 Fcfa pour le carton jaune par joueur et 1000 Fcfa pour le carton rouge. Les primes prévus sont de 150.000 Fcfa pour m’équipe championne, pour la coupe, elle reste une incertitude. « Tout dépendra de la mise des équipes engagées dans la phase de la coupe », indique Julien Moulite le promoteur. Ce qui peut expliquer le peu d’engouement. En cette édition 2007, le nombre des équipes a doublé, il a été de dix-neuf (19) engagées en phase championnat. Pour la phase coupe, c’est encore l’imprécision. « Seules deux équipes se sont acquittées à ce jour de leur participation en coupe. Mais il faut dire qu’il y a douze équipes qui ont donné leur accord de principe », précise Julien Moulite.
Pourtant, le stade Cicam est l’un, sinon le meilleur stade de la ville de Douala. Ces dimensions sont aux normes réglementaires, c’est pourquoi les équipes évoluent avec le nombre joueur requis pour un match de football (11 x 2). Contrairement aux stades l’école publique de Déido, celui du stade Marion de Bassa ou celui de Casmando. Pour ne citer que ces quelques championnats parmi les plus populaires de la ville de Douala, les plus prisés, malheureusement qui se jouent sur les terrains accidentels et réduits. Où les équipes alignent dix (10) joueurs par équipes.
C’est le cas du championnat Wouri Est 2007. Pour emprunter à la circonscription électorale où le promoteur est tombé par deux fois aux investitures internes Rdpc pour les législatives. Ce championnat de Vacances est organisé par Hervé Emmanuel Kom. Un championnat très couru et dont la particularité est d’avoir plusieurs catégories (Minimes – cadet tes – Juniors). Il regroupe un total de 44 équipes (12 minimes, 16 cadettes et 16 juniors). Cet intérêt s’explique par l’importante cagnotte que met en jeu le promoteur. « Cette année il a mis en jeu 3 millions à repartir aux différentes équipes qui se seront distinguées dans chacune des catégories. Il faut dire qu’elle est en baisse, car les années dernière, elle était de 5 millions Fcfa », déclare Robert Banini, le secrétaire général. En revanche, les équipes paient 20.000 Fcfa pour l’affiliation chacune, 1000 Fcfa de frais de licence par joueur chez les minimes, 1500 Fcfa chez les cadets et 2000 Fcfa chez les juniors. En plus des pénalités 500 Fcfa par carton jaune écopé, et 1000 Fcfa par carton rouge. « Notre objectif n’est pas de se faire l’argent, mais d’occuper les jeunes pour leur éviter la débauche en cette période de vacances scolaire où ils sont les plus exposés à tout sorte de vice. D’ailleurs plusieurs clubs finissent le championnat avec d’énormes dettes sans que cela nous offusque », lance John Moni, le président délégué du championnat Wouri Est.
3- Gestion des recettes
La gestion financière est l’une des critères de crédibilité d’un championnat et d’un promoteur. On voit bien qu’il y a ceux qui y viennent pour se remplir les poches et d’autres dans la mobilisation de la jeunesse. Dans le passé on n’a vu les promoteurs se volatiliser dans la nature avec la caisse, ne permettant pas au championnat d’arriver à son terme. D’autres cas sont portés devant les unités des forces de maintien de l’ordre pour arbitrage. Ce sont notamment, les cas des revendications des équipes vainqueurs, lorsqu'elles reclament la totalité ou contestent le montant des primes reçues. Ce manque de crédibilité entraîne très souvent des batailles entre plusieurs candidats pour l’organisation d’un championnat de vacances sur les mêmes stades. Par exemple, c’est ce qui a conduit au changement de dénomination du championnat de vacances de l’école publique de Déido Antérieurement dénommé Deido Foot, et organisé par la section Ojrdpc de Douala 1er, il est devenu Deido Match dès cette édition 2007 après avoir changer de promoteur. Désormais organisé par l’Ajed, une fédération des associations du Canton Déido qui ont reçu à reprendre l’organisation l’Ojrdpc à l’issu d’une âpre bataille que même le Sous-préfet n’est pas parvenue à trancher. Les deux parties ont été renvoyées chez le chef supérieur du Canton Déido qui a départagé les deux parties.
Pour le président de Déido Match 2007, leur intention est loin de se mettre plein les poches. Ce championnat qui est une vitrine, se veut aussi catalyseur de toutes les synergies des jeunes du Canton Déido vers des actions sociales de développement. « Ce que nous pourrons réaliser comme bénéfices, nous allons l’affecter à la réfection de cette école publique de Déido. Cette école porte les souvenirs d’enfance de la plupart d’entre-nous. Et aujourd’hui, cette école est dans un état de délabrement total. C’est la désolation pour nous autre », lance Charly Manga. Au stade Marion de la cité-sic, Hervé Emmanuel Kom y a construit en 2001 une tribune à 6,5 millions Fcfa qui en fait la fierté des utilisateurs de ce stade. Mais ils attendent impatiemment l’aménagement de cet air de jeu très accidentel. « On sait que les populations attendent cela avec impatience. Le promoteur en est conscient, il envisage dès la fin des vacances de concrétiser le projet d’aménagement de ce stade avec l’apport d’un partenariat qu’il vient de décrocher », dit Jean Moni.
4- Violence
Il reste que les championnats de vacances sont des terres fertiles, où la violence est courante. Notamment en cette période où les éliminatoires battent leur plein. La passion déferlante conduit à des débordements et très souvent pour un rien. Des actes qui découlent des querelles et des rivalités entre les jeunes des différents quartiers, mais surtout aux paris qu’elles suscitent. Au championnat Relance Foot du stade Cicam, des actes de violences et des matches qui ne sont pas allés jusqu’à leur fin sont déjà enregistré. Au championnat Wouri Est du stade Marion, les contestations bruyantes des décisions d’arbitres sont récurrentes. « Tout ceci s’explique par le fait que les jeunes viennent d’horizon divers, avec des cultures, des mentalités et des éducations différentes », explique Robert Banini. Pourtant dans la plupart des championnats de vacances, les commissions d’arbitrage sont dirigées par des arbitres de division 1. A l’instar de Mandeng Bakaly à Relance Foot, Ngo Loulouga à Wouri Est. Ils ont la charge d’utiliser leur entregent pour faciliter la collaboration des arbitres des divisions. Une chance que Déido Match n’a toujours pas, faisant recours aux personnes éprises par l’arbitrage, sans justifier une qualification avérée. Ce qui peut aussi expliquer le faible montant du droit d’arbitrage que doivent s’acquitter à chaque match les équipes dans ce championnat (1000 Fcfa par équipe). Pourtant là où les arbitres de divisions sont sollicités il est de 2000 Fcfa par équipe.
5- Respect du calendrier
S’il y a en ce moment, une situation qui turlupine les promoteurs des championnats de vacances, c’est le respect du calendrier. Outre la recherche des primes pour ceux qui n’ont pas encore décroché de sponsor ou ceux qui ne sont pas sous le joug d’un mécène. Car, chaque promoteur s’est engagé au moment de l’obtention des autorisations de clôturer leur championnat respectif avant le début de la rentrée (le 3 septembre 2007). Une condition sine qua non sur laquelle les autorités compétentes disent ne pas transiger. Mais sur le terrain, l’on observe une gestion à deux vitesses. Il y a ceux qui se conforment et il y en a qui, clôturent leur championnat des semaines après. Curieusement ses finales de clôtures sont présidées par ces mêmes autorités.
Dans la lancée des championnats de vacances en bonne voie dans le respect du calendrier, se retrouve actuellement, le championnat de vacances Akwa Foot qui se joue au stade Mbappé Lepé. Ainsi que le championnat de vacances de Casmando qui se dispute au sein de l’enceinte de Cafrad et est organisé par la synergie jeunes de ce centre. Ce dernier championnat a joué ses demi-finales aller samedi 18 août 2007 et les matches retour sont prévus pour ce mercredi 22 août.
Mathieu Nathanaël NJOG