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28 juin 2021 1 28 /06 /juin /2021 14:51

INTERPELLATION

Dans leurs missions de veille, l’ONG Un Monde Avenir et ses partenaires associatifs, ont adressé une lettre épistolaire au parlement le 22 juin 2021 dans laquelle ils exhortent ces derniers à user de leurs prérogatives prévues à l’article 34 alinéa 3 de la Constitution pour se saisir des problèmes qui affectent le quotidien des camerounais et dont la liste reste  exhaustive.  Ils demandent à ces derniers de saisir l’occasion de la session actuellement en cours pour adopter une résolution claire sur la crise anglophone en prenant en compte l’échec de l’option militaire qui a été prise par le gouvernement jusqu’ici. Notamment en suscitant une concertation multi acteurs en vue de la réforme du système électoral; en créant des Commissions d’enquêtes parlementaires pour faire la lumière sur la gestion des fonds alloués à l’organisation de la Coupe d’Afrique 2019 et à la lutte contre le coronavirus et ses effets connexes.

 

Mesdames

Messieurs

Honorables membres du Parlement

La Loi n°96/06 du 18 janvier 1996 portant révision de la Constitution du 02 juin 1972, modifiée et complétée par la loi n°2008/001 du 14 avril 2008, fait de la République du Cameroun un Etat souverain dont l’autorité est, selon l’article 4 exercée par le Président de la République et le Parlement.

L’article 14 de cette loi fondamentale stipule que :

« (1) Le pouvoir législatif est exercé par le Parlement qui comprend deux (2) chambres :
-l’Assemblée Nationale ;
- le Sénat.

(2) Le Parlement légifère et contrôle l’action du Gouvernement »

Les missions du Parlement sont davantage précisées aux articles 34 et 35

L’article 34 (3) dispose ainsi que « L’Assemblée Nationale peut mettre en cause la responsabilité du Gouvernement par le vote d’une motion de censure. Pour être recevable, la motion de censure doit être signée par au moins un tiers des membres de l’Assemblée Nationale. Le vote ne peut intervenir moins de quarante-huit (48) heures après le dépôt de la motion de censure. La motion de censure est adoptée à la majorité des deux tiers des membres composant l’Assemblée Nationale »

L’article 35 quant à lui dispose que « (1) Le Parlement contrôle l’action gouvernementale par voie des questions orales ou écrites et par la constitution des commissions d’enquêtes sur des objets déterminés.»

L’ONG Un Monde Avenir et ses partenaires associatifs, dans leurs missions de veille, ont à ce jour, fait les constats suivants :

Sur le plan sociopolitique

Les dernières consultations électorales tenues au Cameroun ont mis en évidence le caractère vicié et vicieux du cadre institutionnel et juridique des élections au Cameroun. De l’opacité dans la conduite des opérations électorales à l’intrusion quasi permanente de l’administration publique dans le déroulement des opérations, les multiples conflits qui ont suivi après chaque élection depuis la présidentielle de 2018 jusqu’aux élections régionales de 2020, montrent à suffisance l’impérieuse nécessité d’une réforme du système électoral.

Depuis octobre 2016, les régions du Sud-Ouest et du Nord-Ouest sont secouées par une crise sécuritaire qui, des revendications sociales de départ, s’est muée en un conflit armé opposant des groupes séparatistes aux Forces de défense et de sécurité officielles. Avec des conséquences humanitaires graves. Outre les pertes en vies humaines se chiffrent à plusieurs milliers à ce jour, des centaines de milliers de civils se sont déplacés à l’intérieur du pays ainsi que des milliers de personnes réfugiées au Nigéria voisin.

Selon les résultats d’une enquête du Commissariat général aux réfugiés et aux apatrides, clôturée le 16 septembre 2019, « plus de 536.000 personnes issues des régions du Sud-Ouest et du Nord-Ouest se sont déplacées de manière interne. Environ 39.000 personnes ont déjà été recensées par le HCR au Nigeria. ».

Les derniers événements en date montrent une recrudescence des violences dans ces régions, des scènes horribles sont diffusées dans les réseaux sociaux où l'on voit des actes d'une cruauté indescriptible perpétrés par des personnes se réclamant des groupes armés sécessionnistes. Alors même que le discours officiel souligne une situation sous contrôle, le 15 juin 2021 à Massore Balue, un village de l’arrondissement d’Ekondo-Titi dans le département du Ndian, région du Sud-Ouest, six (6) responsables administratifs ont été kidnappés, un d'entre eux a été retrouvé mort quelques jours après. Le rapport du groupe de travail de Stand Up For Cameroon rendu public le 18 Juin 2021 fait état d’au moins 168 personnes tuées et au moins 68 personnes kidnappées dans ces régions ces 5 derniers mois.

Au plan économique

L’économie nationale a été durement touchée dans ces deux régions. Selon le Groupement interpatronal du Cameroun (Gicam), au 31 juillet 2019, « en se focalisant sur 10 secteurs d’activités uniquement, ses pertes sont estimées à près de 800 milliards de FCFA au bout de trois ans », sans compter l’impact sur les recettes de l’Etat dont le manque à gagner était estimé à la même date à près de 18,5 milliards de FCFA perdus par le trésor public depuis le début de la crise. De même, cette crise a complètement explosé le budget de l’Etat tout en accentuant l’état de délabrement de la qualité de vie au Cameroun. Les mesures prises par le Gouvernement, y compris la tenue d’un Grand dialogue national n’ont pas jusqu’ici apporté des réponses aux préoccupations profondes des populations des deux régions en crise.

Au plan financier et budgétaire

Dans le même temps, la dette publique camerounaise a crû de 4 324 milliards FCFA entre 2016 et 2020, passant de 6 010 milliards FCFA à 10 334 milliards FCFA sur une période de 4 ans, selon les données compilées par la Caisse Autonome d’Amortissement (CAA). Le chômage est devenu endémique, alimentant ainsi l’insécurité qui va grandissant dans les villes et les villages.

Au niveau de la Gouvernance

Les détournements des deniers publics ont atteint des pics des plus alarmants, entrainant les retards ou le non achèvement voire l’abandon de nombreux chantiers publics, dont entre autres, ceux liés à l’organisation de la Coupe d’Afrique des Nations. La compétition qui était prévue au Cameroun en 2019 et renvoyée pour 2021 a déjà englouti plusieurs de nos milliards de franc CFA, sans que les infrastructures y relatives soient achevées.  Un rapport de la Chambre des Comptes de la Cour Suprême sur la gestion du « Fonds spécial de solidarité nationale pour la lutte contre le corona virus et ses répercussions économiques et sociales » doté d’un montant de 180 milliards de francs CFA, a été rendu public via les réseaux sociaux le Jeudi 20 Mai 2021. Présenté comme un rapport d’étape, ce document fait état des procédures impliquant plusieurs départements ministériels à savoir :

  • Une (01) procédure de gestion de fait
  • 30 procédures de fautes de gestion
  • 10 procédures concernant des faits susceptibles de constituer des infractions à la loi pénale.

Les malades d’insuffisance rénale ne cessent de se plaindre du manque de soins dû à la rupture des kits d’hémodialyse, des pannes de machines ou de l’absence des salles d’eau, en témoigne le dernier mouvement d’humeur du 1er juin 2021 devant l’Hôpital général de Yaoundé.

Aussi, l’ONG Un Monde Avenir et ses partenaires associatifs vous demandent de saisir l’occasion de vos sessions respectives en cours en ce moment, pour vous pencher sur ces problèmes qui sont loin d’être exhaustifs, et notamment vous référer à vos missions tel que rappelées plus haut pour :

  • Adopter une résolution claire sur la crise anglophone en prenant en compte l’échec de l’option militaire qui a été prise par le gouvernement jusqu’ici.
  • Susciter une concertation multi acteurs en vue de la réforme du système électoral.
  • Créer des Commissions d’enquêtes parlementaires pour faire la lumière sur la gestion des fonds alloués à l’organisation de la Coupe d’Afrique 2019 et à la lutte contre le coronavirus et ses effets connexes.

Au demeurant, l’ONG Un Monde Avenir et ses partenaires associatifs vous exhortent à user de vos prérogatives prévues à l’article 34 alinéa 3 de la Constitution, pour retirer votre confiance au Gouvernement.

Fait à Douala le 22 Juin 2021

Le Coordinateur

Philippe NANGA

 

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